LE GRAISSAGE

Toute pièce mécanique en mouvement a besoin, pour fonctionner régulièrement, d'un lubrifiant formant pellicule entre les parties frottantes pour éviter l'usure de celles ci.

Dans les organes délicats des projecteurs, un soin tout particulier doit être apporté au graissage. prenons par exemple la came commandant le porte griffe. Sait-on qu'elle fonctionne à raison de 16 tours à la seconde ? ce qui représente 960 tours à la minute ou encore 57 600 tours à l'heure.

Donc pour une séance moyenne de deux heures, le porte griffes à frotté 115 200 fois sur cette came à sa partie supérieure et autant de fois sur sa partie inférieure. Ceci pour le muet ; pour le parlant il faut majorer ce chiffre de 50 %

On comprendra donc qu'il est nécessaire à chaque séance de lubrifier (sans excès cependant) ces pièces en mouvement. Si l'on graisse avec excès, on risque les projections d'huile sur le film ce qui n'est pas recommandé. Si l'on graisse insuffisamment, on risque l'usure des pièces en mouvement. Donc après chaque séance, une goutte d'huile seulement aux coussinets des axes, à la came, à l'axe des griffes, aux axes des débiteurs s'il y a lieu, bref à toutes les pièces aux endroits du frottement.

L'huile à employer doit être fluide (huile Pathé) afin d'éviter la formation de "cambouis" qui donne du dur et encrasse.

Et si le projecteur est insuffisamment graissé, quels accidents peuvent arriver ?

Le plus grave est surtout l'usure de la came ou du porte griffe. Dans ce cas, il se produit un jeu entre les deux ce qui modifie la course des griffes. Après une usure assez prononcée, les griffes au lieu d'avoir une pénétration normale dans les perforations du film, viennent s'appuyer de la pointe sur la lèvre inférieure de la perforation et chassent le film en l'appuyant sur le presseur ou bien encore le font remonter légèrement, ce qui produit un manque de fixité. Le plus souvent, le film se déchire à l'endroit des perforations et devient rapidement inutilisable.

Le manque de graissage au moteur amène souvent un grippage de son axe ou, par suite d'un échauffement exagéré, la rupture des connexions. D'où réparations quelquefois couteuses qu'il est facile d'éviter avec un peu de soin.

Là encore, un excès de graissage peut être nuisible. si un excès d'huile vient se placer sur le collecteur (cas des moteurs universels) le contact ne se fait plus entre celui ci et les charbons et il devient nécessaire de démonter entièrement le moteur pour décrasser le collecteur.

Un autre cas, beaucoup plus rare, peut se produire : c'est le grippage de l'axe supérieur dans le support des bobines super.

Ces dernières se trouvant freinées retiennent le film et les griffes continuant à faire leur office arrachent la lèvre inférieure de la perforation du film. Ce cas est assez rare mais s'est déjà produit au retour d'un séjour au bord de la mer ou dans un endroit humide, alors que la rouille avait attaqué l'axe à la suite d'un manque de graissage. Ceci n'arrive évidemment que dans les appareils sans débiteurs puisque ces derniers aident le film à se dérouler.

En résumé, pour la bonne marche des projecteurs, il faut veiller à leur entretien. Eviter l'usure des pièces par un graissage rationnel, sans exagération, qui conservera au mouvement une durée illimitée.

Les autres pièces ne risquent pas de se détériorer d'elles mêmes et seules les lampes demandent à être changées après un emploi plus ou moins long, suivant la régularité du courant sur lequel les appareils sont branchés.

Quatre vingt dix pour cent des réparations sont dues à un manque d'entretien. Il vaut mieux passer une minute à la vérification après projection que de s'exposer à une réparation pouvant entrainer des frais quelquefois onéreux.

L.P.
Le Cinéma Chez Soi N° 111 - Avril Mai 1938